L’annonce du lancement compliqué de Dragon Age: The Veilguard a profondément secoué la communauté de fans de BioWare. Malgré la présence de développeurs expérimentés issus des précédents opus, le projet s’est heurté à des décisions hiérarchiques contraignantes, menant à un résultat final très éloigné des intentions initiales.
Des vétérans écartés malgré leur engagement
Contrairement à l’idée reçue que The Veilguard aurait été conçu par une toute nouvelle équipe, le jeu s’appuyait en réalité sur de nombreux vétérans de Dragon Age. Ces anciens développeurs avaient travaillé sur la franchise depuis le tout premier épisode, Dragon Age: Origins, et leur expérience devait garantir une certaine continuité. Pourtant, presque tous ont été licenciés avant ou après la sortie du jeu, accentuant le sentiment de gâchis autour de ce nouvel opus.
Les licenciements massifs posent question quant à la stratégie à long terme de BioWare et l’avenir de la série. L’expérience et la vision qu’apportaient ces anciens membres semblent ne plus être des priorités pour la direction actuelle, au profit d’une gestion plus industrielle.
Des décisions imposées par la hiérarchie
Mark Darrah, ancien poids lourd de BioWare revenu en tant que consultant sur The Veilguard, a tenu à tempérer les critiques formulées par les joueurs et la presse.
Dans une vidéo, il rappelle que des obstacles internes, comme les changements fréquents de direction ou les délais non réalistes, peuvent gravement perturber le développement. Il évoque aussi la difficulté de juger un jeu sans connaître ce qui s’est passé en coulisses.
Ce point est crucial, d’autant plus qu’il a été confirmé que Dragon Age 4 a été redémarré deux fois. Le projet était au départ pensé comme un jeu en tant que service, avant de changer d’orientation, ce qui a radicalement influencé sa structure et son identité. Ce revirement a, par conséquent, affaibli la cohérence narrative et les repères habituels de la série.
Les créateurs forcés à dévier de leur vision
Les choix créatifs visibles dans The Veilguard ne reflètent pas nécessairement l’envie des développeurs. John Epler, directeur créatif du jeu, a reconnu que certaines directions artistiques et mécaniques résultaient non pas de décisions internes mais d’ordres imposés par Electronic Arts.
Cette pression a contraint les équipes à présenter un jeu qui n’était plus tout à fait le leur.
Le Dragon Age Community Council, composé de fans de longue date consultés pendant le développement, a confirmé cette version. Beaucoup d’idées proposées, comme le retour à quelques mécanismes classiques (groupe restreint, style artistique plus traditionnel, choix narratifs profonds), ont été systématiquement refusées par la hiérarchie. Ces rejets répétés montrent à quel point les développeurs étaient empêchés d’écouter leur base de fans.
Un studio en perte d’âme et de repères
Plusieurs créateurs de contenu ayant collaboré avec BioWare depuis plus d’une décennie, comme Miss Insanity, ont témoigné du changement de climat au sein du studio. Selon elle, au fil des années, la flamme créative des développeurs s’est lentement éteinte, étouffée par une gestion toxique. Cette atmosphere délétère aurait, selon elle, définitivement coupé le studio de son identité initiale.
Ce processus d’effritement avait commencé avec Anthem, considéré comme le premier véritable tournant négatif pour le studio. Depuis, BioWare semble se battre pour retrouver sa créativité tout en étant soumis à des directives de plus en plus centrées sur la rentabilité.
David Gaider, ancien scénariste principal de Dragon Age, a récemment réaffirmé que chaque jeu de la saga a failli être annulé en raison du manque de soutien de la part d’EA, qui privilégiait Mass Effect.
Les effectifs réduits d’un épisode à l’autre, les conflits de direction et l’absence de reconnaissance ont pesé sur les équipes. Ce contexte rend l’échec de The Veilguard moins surprenant : il serait le résultat d’un problème structurel profond chez BioWare.
Le cas de Corinne Busche, actuelle directrice du jeu, est également révélateur. Bien qu’elle soit arrivée lorsque le projet a enfin semblé prendre une forme claire, elle est aujourd’hui injustement tenue responsable de ses faiblesses. Ce redressement tardif n’a pas suffi à rétablir l’ensemble du projet.
Et maintenant, Mass Effect 5 ?
Pendant que Dragon Age s’effondre, Mass Effect 5 est toujours en développement. Le projet poursuit sa route malgré les vagues de licenciements et les restructurations internes. Pour le président d’Electronic Arts, Andrew Wilson, l’échec de The Veilguard serait en partie dû à l’absence de modèle en service continu—l’un des critères de rentabilité favoris du groupe.
Cette dernière déclaration suscite l’inquiétude : nombreux sont les fans qui craignent que BioWare continue à subir les conséquences d’investissements mal dirigés et d’une stratégie déconnectée des attentes narratives et émotionnelles de sa communauté. Tant que ce schéma perdure, l’espoir de voir renaître l’esprit originel de BioWare reste incertain.